Hommage à Morihiro Saito O'Sensei
Auquel je voudrais exprimer toute ma gratitude
J'ai connu Morihiro Saito Sensei en 1985, date à lequelle j'ai
commencé à suivre son enseignement pendant 3 ans à
demeure au Dojo d'Iwama, au Japon. J'ai continué à le
suivre jusqu'en 1996, en allant régulièrement lui rendre
visite.
Je voudrais vous faire imaginer un personnage heureux de
vivre, bien
portant, exprimant toute sa passion durant mon séjour en
reproduisant l'enseignement du Fondateur.
De 1985 à 1988, j'étais uchi-deshi,
disciple
interne,
au Dojo d'Iwama. Saito Sensei a fait de moi durant cette période
une personne très proche de lui ; je l'aidais chaque jour en
m'occupant du Dojo, avec des tâches bien précises faisant
de moi la responsable des lieux.
Ce travail quotidien que je faisais en grande partie avec lui m'a valu
une relation particulière, qui s'est traduite par une attention
dévouée dans l'enseignement qu'il professait
quotidiennement.
Cet enseignement d'une grande valeur pour l'esprit et le
corps
s'est
traduit par une récompense lorsqu'en 1993, il me remit les
certificats des armes Aiki-ken, Aiki-jo : Bukiwaza, 1er, 2ème,
3ème, 4ème, et 5ème Dan, faisant de moi le
représentant le plus autorisé. Sur chaque diplôme
est portée une mention particulière avec son
appréciation.
A Iwama, il m'avait attribué la chambre du
Fondateur
Morihei
Ueshiba comme logement. Je dormais et entretenais ces lieux sous ma
responsabilité.
La journée débutait au levé à 5h30 avec la
toilette personnelle (se laver les dents, prendre une douche) suivi
d'un café rapidement pris, puis suivait la préparation du
Kamisama, l'autel dédié aux esprits. Durant cette
période, j'étais la seule personne autorisée
à le faire avec sa femme.
Ensuite venait le nettoyage du Dojo avec les personnes de passage, puis
la préparation du terrain à l'extérieur
réservé à la pratique des armes : ratisser,
enlever les aspérités, les feuilles mortes et niveler le
terrain, le tout devant être prêt pour le cours du matin
qui avait lieu à 7 heure l'été et à 8 heure
l'hiver. Le cours, très intensif, durait une heure. Durant
l'hiver, le thermomètre flirtait aux alentours de -10°C et
je me trouvais bien souvent avec lui en compagnie d'une poignée
d'élèves de passage, au maximum 5 ou 6. Cela devenait un
cours particulier où l'enseignement était
privilégié, avec tout le coeur et la passion qui animait
ce personnage, Morihiro Saito O'Sensei.
Après le cours, les étudiants vaquaient
à
leurs
occupations. Quant à moi, je prenais le petit déjeuner
avec lui, puis nous participions ensemble à l'entretien des
lieux (nettoyage en tous genres : tondre le gazon, couper et
brûler des branches, retapisser des portes, nettoyer le temple de
l'Aiki construit par le fondateur...).
Nous finissions généralement vers 13h. Bien souvent nous
mangions ensemble. Il préparait des grillades, des pâtes
ou du poisson cru. Parfois c'était très bon et parfois
très spécial, voire immangeable. Il me demandait tout le
temps : "C'est bon ?" et je répondais "C'est bon !",
donc c'était toujours bien !
L'après-midi était destiné à
mon
entraînement libre : environ 2 à 3 heures qu'il
m'ordonnait de faire. Parfois il m'enseignait le Shuriken Jutsu en
secret, pour me récompenser de ma journée. A ce sujet, il
m'a délivré après examen le grade de 2e Dan au tir
lancé groupé à 7 mètres, avec autorisation
de l'enseigner. C'est une technique dangereuse que je pratique rarement
; avec le temps, je verrais à qui je pourrais retransmettre ce
savoir.
Ensuite arrivait le cours du soir, de 19h à 20h,
préalablement, il fallait à nouveau nettoyer le Dojo et
ses abords dès 18h.
Après le cours à 20h, il m'arrivait aussi d'aller manger
avec Morihiro Saito O'Sensei ou bien avec son fils Hito-Hiro Saito
Sensei. Nous rentrions généralement vers 11 heures ou
minuit. Le lendemain débutait une autre journée, et le
Maître, toujours là, veillait au bon déroulement
des tâches quotidiennes.
Son fils Hito-Hiro Sensei est un excellent cuisinier et
un
très bon technicien. Maître Morihiro Saito O'Sensei a
créé une nébuleuse informelle en 1996 pour que son
fils puisse poursuivre l'enseignement de son père sous le nom de
Iwama Ryu. De ce fait, beaucoup d'étrangers sont venus lui
rendre visite pour suivre l'enseignement d'Hito-Hiro Saito Sensei, pour
pouvoir le représenter.
Morihiro Saito O'Sensei a formé plusieurs
personnes en
Europe
qui ont suivi son enseignement assez longtemps et sérieusement.
Quant à moi, j'ai fait le serment de transmettre
fidèlement cet enseignement, comme il me l'a demandé et
ma mémoire restera à jamais fidèle à
Morihiro Saito O'Sensei.
Je protègerai et resterai fidèle à l'enseignement
reçu à travers mon école Aiki-Bukikai : les armes
de l'aiki : aiki-ken, aiki-jo : bukiwaza et Taijutsu (travail du
corps).
Aujourd'hui, cette école en cours de développement est
représentée en Allemagne, au Maroc par M. Bahdou, en
Guadeloupe, au Cameroun, mais restons humble et secret, je ne vous en
dirais pas plus ! Keiko, Keiko, Keiko !
Merci Sensei, merci ! Je n'oublierais jamais sa
compétence,
la gentillesse qu'il a eue envers moi à travers les cours
privés qu'il m'a donnés, dont son fils Hito-Hiro Saito
Sensei fut le témoin.
Morihiro Saito O'Sensei me manquera toujours.
Patricia Guerri
|